Dans le but de limiter le réchauffement climatique planétaire à 1,5°C pour respecter l’accord de Paris signé en 2015, il est nécessaire d’atteindre zéro émission nette de carbone d’ici 2050.
Cela passe par une électrification des usages plus importante, par l’arrêt des énergies fossiles et par un changement structurel de nos habitudes de consommation et de production.
Notre manière de nous déplacer n’échappe pas à cette évolution de paradigme. L’essor des véhicules hybrides et électriques va participer à la réalisation de cet objectif de réduction drastique d’émission carbone. Ce chantier semble d’ailleurs bien entamé.
Alors que les ventes de véhicules électriques neufs en France ne représentaient que 1,19% des parts de marché en 2015 ; elles constituent un bon quart des ventes avec 26% du total du parc automobile neuf en 2023.
Peut-on cependant affirmer sans ciller que la voiture électrique constitue la solution unique à une réduction d’émissions carbones ?
Quelle est la place de la voiture dans la pollution en France ?
En France, 31% des émissions de gaz à effet de serre (GES) sont causées par l’automobile. Dans ce secteur, les GES regroupent notamment le CO2, mais également l’oxyde d’azote et les particules fines. On résume souvent les GES au CO2 par praticité et parce qu’il représente 2/3 des émissions mondiales.
54% parmi ces 31% proviennent des véhicules dits légers – par opposition aux poids lourds et autres utilitaires – soit les voitures que nous conduisons.
Face à ce constat et à l’urgence climatique, la voiture électrique apparait comme une belle alternative. Mais elle n’est pas exempte de pollution. Penchons-nous ensemble sur son empreinte carbone.
Comment calculer l’empreinte carbone d’une voiture électrique par rapport à un véhicule thermique ?
Le calcul de l’empreinte carbone d’une voiture varie en fonction des trois motorisations actuelles :
- Les moteurs à combustion, qui utilisent du carburant type essence ou diesel ;
- Les moteurs électriques ;
- Les hybrides rechargeables ou pas.
L’analyse que nous allons présenter ne tient pas compte des moteurs à hydrogène, encore très coûteux et pour lesquels nous n’avons pas encore assez de recul pour interpréter précisément les résultats.
Une fois que nous avons catégorisé les différentes motorisations, il convient de découper les phases de vie de notre voiture. Ici la répartition s’entend comme suit :
- La fabrication, qui rassemble les phases d’extraction des matières premières indispensables à la construction du véhicule, l’assemble de la carrosserie des composants et la construction du moteur et de la batterie le cas échéants ;
- L’utilisation, qui se concentre sur ce qui rend possible l’usage du véhicule, à savoir la combustion de carburants ou la recharge de la batterie ;
- La fin du vie, qui regroupe la récupération des pièces encore opérationnelles, le démantèlement, la dépollution des composants polluants (huiles, airbags, etc.), le recyclage et la valorisation des déchets du véhicule.
En plus de ces étapes incontournables, l’empreinte écologique d’un véhicule électrique peut également varier selon le poids du véhicule, la conduite de son propriétaire, le mix énergétique du pays dans lequel elle roule… La présente analyse propose donc une moyenne.
Calculer l’empreinte carbone de la fabrication d’une voiture thermique face à une voiture électrique
L’empreinte moyenne de fabrication d’une voiture thermique est de 40grCO2e/km. Les différentes motorisations sont assemblées de la même manière et aucune d’entre elles ne se détache par le haut ou par le bas de cette moyenne.
Pour une voiture électrique, la situation est sensiblement distincte. Pour ce qui est de l’assemblage, la base reste identique, puisqu’il s’agit de matériaux semblables à peu de choses près. C’est au niveau de la batterie que la situation diverge, puisque cet élément compte à lui seul pour 45% de l’empreinte totale de la fabrication d’une voiture électrique. Ce poids remarquable est notamment dû aux matériaux rares qui la composent, tels que le lithium ou encore le cobalt. Ces composants soulèvent également, en plus de leur empreinte écologique, des questions sociales qui ont leur importance.
Le raffinage de ces éléments est énergivore, d’autant plus que la Chine, qui fabrique et traite une grande majorité des batteries mondiales, à un mix énergétique encore largement baignée par l’usage du charbon. La moyenne pour la fabrication d’une voiture électrique est donc de 83,6 grCO2e/km soit plus du double que pour la fabrication d’une voiture thermique.
Calculer l’empreinte carbone de l’usage d’une voiture thermique face à une voiture électrique
C’est à cette étape que les tendances s’inversent. Pour les voitures thermiques, l’utilisation dépend du carburant qui alimente le moteur. Ainsi, il a été calculé la répartition suivante :
- 200 grCO2e/km pour l’essence ;
- 190 grCO2e/km pour le diesel – qui émet en plus bien davantage de particules fines ;
- 192 grCO2e/km pour le GPL ;
- 183 grCO2e/km pour le bioéthanol.
Quel que soit sa motorisation thermiques, les émissions causées par ces différents types de moteurs se tiennent dans un mouchoir de poche. Ils ont tous une empreinte remarquable, surtout lorsqu’elle est reportée sur la durée de vie de la voiture, où l’usage est d’au moins 200 000 km.
C’est en comparaison de cette situation que les véhicules électriques tirent leur épingle du jeu. En effet, l’utilisation d’une voiture électrique se résume aux recharges de sa batterie et donc au mix électrique qui constitue cette recharge.
En France, nous avons l’avantage de pouvoir compter sur un mix énergétique largement décarboné. Aussi la recharge de la batterie a une empreinte bien moindre que celle des voitures thermiques. Leur empreinte moyenne est ici de 59,9 grCO2e/km.
Une citadine urbaine thermique consomme à l’usage 2,5 fois plus qu’une voiture électrique de la même catégorie, malgré une fabrication bien plus énergivore. On estime entre 40 000 et 50 000 km le seuil au-delà duquel les émissions carbone de la batterie sont compensées par l’usage économe en énergie. Ce chiffre dépend encore une fois du type de véhicule (citadine, compact, SUV, etc.).
Les véhicules électriques ne sont cependant pas exempts de pollution à l’utilisation, puisque des particules fines émanent du roulage des pneus.
Pour les questions de fin de vie et de valorisation des déchets, les batteries, sont de mieux en mieux recyclables, et il n’est normalement pas nécessaire de les changer en cours de vie (elles sont censées pouvoir durer de 15 à 20 ans).
Il est donc important de relativiser le côté véhicule vert car l’empreinte carbone d’un véhicule électrique existe bel et bien. Parler de véhicule propre n’est pas tout à fait exact, même si les voitures électriques sont un bon moyen de réduire durablement les émissions, notamment celles liées à l’usage. Il reste primordial de faire évoluer nos habitudes vers plus de sobriété, en empruntant les mobilités douces par exemple, pour que l’ensemble des actions individuelles entraînent des conséquences marquantes et collectives.