Le 17 octobre 2023, les ministres de l’énergie des 27 pays de l’Union Européenne ont trouvé un accord pour faire évoluer le fonctionnement du marché de l’électricité. Cette résolution a pour but de limiter la volatilité des prix et d’inciter les consommateurs à se tourner vers des énergies vertes et décarbonées. Pour atteindre cet objectif, le texte incite les producteurs à investir massivement dans ces mêmes énergies, notamment pour s’approcher des aspirations du fit for 55.
Comment fonctionne aujourd’hui le marché de l’électricité en Europe et pourquoi le faire évoluer ?
Jusqu’à présent, et sans mauvais jeu de mots, c’est un peu une usine à gaz. En effet, les prix de gros de l’électricité sur le marché européen sont fixés par la dernière centrale électrique nécessaire pour répondre à la demande globale. Cela veut dire par exemple que par beau temps, ou temps venteux, l’électricité est en général produite en assez grande quantité par les centrales solaires ou éolienne, pour que son prix soit déterminé par un de ces deux types de production. Notons par ailleurs qu’en journée, les pics de consommation sont plus rares, puisqu’ils sont plutôt situés entre 6h et 9h et entre 16h et 22h : finalement avant qu’on parte au travail et quand on rentre chez soi le soir (les gens sont si prévisibles).
En revanche, si la demande explose et que toutes les centrales solaires, éoliennes, hydrauliques, nucléaires, etc., sont déjà à leur maximum en termes de capacités de production, on fait alors appel à des centrales fossiles : à charbon ou à gaz. De fait, le prix de l’électricité est aujourd’hui corrélé à celui du gaz.
Or, si de nombreux pays de l’Union possèdent leurs propres unités de production électrique, ils dépendent quasiment tous du gaz, ce qui explique en partie son prix plus élevé.
Comme la France a par exemple pu le constater lors de la crise de l’énergie de 2021-2022, la reprise économique post Covid et la guerre en Ukraine ont fragilisé un système qui n’avait pas connu avant cela, de véritable perturbation. Les demandes en électricité ont augmenté et le prix du gaz a bondi suite à la situation géopolitique. Aussi, de manière aussi artificielle en théorie que réelle dans les faits, les prix de l’électricité se sont envolés un peu partout, pour atteindre des niveaux délirants, qui ont conduit à des augmentations généralisées.
Le principe qui fonctionnait jusque là a trouvé ses limites dans cette crise. C’est donc à la fois pour mettre fin à une situation inégalitaire et investir massivement dans les énergies renouvelables et décarbonées que le texte de réforme du marché de l’énergie a vu le jour.
Comment va s’organiser dans les fais la réforme du marché de l’énergie en Europe ?
Alors qu’à l’heure actuelle, les contrats sont plutôt signés à court terme, la volonté du texte est de mettre en place entre autres, des contrats à long terme, sur plusieurs années, pour lutter contre la volatilité des prix qui a pu être constaté par le passé. Cela aura pour résultat théorique de baisser les coûts de l’énergie pour les clients finaux, entreprises et particuliers, qui sont bien souvent les premières victimes en temps de crise.
C’est aussi l’urgence écologique qui est traduit dans cet accord, puisque ce dernier incite des investissements importants dans les énergies renouvelables et décarbonées.
Afin de rendre attractif cette nécessité d’investissement et renforcer la compétitivité des entreprises européennes, l’accord mise sur les contrats pour différence, aussi appelés CFD. Ces types de contrats, signés entre des investisseurs et les pouvoirs publics pour plusieurs années, fonctionnent de la manière suivante : si le prix du marché est supérieur au prix du contrat signé, l’Etat récupère le les bénéfices excessifs pour les redistribuer aux ménages et à l’industrie. A l’inverse, si le prix négocié est en dessous des tarifs constatés sur les places financières, les investisseurs ne perdent pas leur mise.
Les prix plancher et plafond seront quant à eux déterminés en fonction de la technologie de l’énergie, auquel on rajoutera une marge pour le producteur. Les prix finaux seront donc davantage le reflet du coût réel de production qu’auparavant.
Tous les pays de l’Union étaient-ils d’accord lors des discussions de la réforme du marché de l’énergie en Europe ?
Le texte qui souhaite réformer le fonctionnement du marché de l’énergie en Europe n’a dans un premier temps pas fait l’unanimité auprès de tous les pays signataires. En effet, l’Allemagne s’est longtemps opposée à la position de la France concernant le nucléaire.
Comme chacun le sait, ou s’apprête à l’apprendre, l’Allemagne est un pays farouchement anti-nucléaire. Tant est si bien qu’il lui a notamment préféré le charbon pour produire de l’électricité. Néanmoins, le nucléaire rejoint les ambitions de décarbonation de l’UE d’ici 2050 et a finalement rejoint le texte.
En plus de son aversion intrinsèque, l’Allemagne s’opposait aux CFD pour le nucléaire, parce qu’historiquement moins cher que les énergies renouvelables et donc plus avantagé par le procédé.
Le pays a finalement cédé en manifestant sa confiance en Brussels pour contrôler au plus près le mécanisme.
Quand va être mis en place la réforme du marché de l’énergie en Europe ?
Le texte définitif doit encore être produit et adopté. Il reste donc quelques étapes de négociations avant d’entériner complètement l’accord de la réforme du marché de l’énergie en Europe.